Située au nord de l’Amazone, la Guyane française se distingue par une forêt tropicale couvrant plus de 96 % de son territoire.Ainsi, cette région exceptionnelle offre un habitat idéal pour une biodiversité remarquable, en particulier pour les passionnés d’herpétologie.
Article et photographies de © Julien Clozeau / édité par Alex Chhor.

Un trésor méconnu de la Guyane
L’herpétologie : est la branche de la zoologie qui étudie les reptiles et les amphibiens. Cette discipline scientifique se penche sur la biologie, l’écologie, le comportement, et l’évolution de ces animaux fascinants.
Avec 124 espèces d’amphibiens et 161 espèces de reptiles répertoriées, cette région est un hotspot de biodiversité. Les périodes de pluie, de décembre à février et d’avril à juillet, révèlent toute la richesse de cette faune colorée et mystérieuse. Toutefois, cette abondance cache une fragilité que seule une gestion rigoureuse des écosystèmes peut
préserver.
Les amphibiens : Merveilles de la forêt tropicale
Les anoures, qui regroupent grenouilles et crapauds, représentent de véritables joyaux de la biodiversité guyanaise.
Parmi celles-ci, les rainettes amazoniennes, comme Phyllomedusa vaillantii, se distinguent par leur beauté et leurs caractéristiques biologiques uniques. Dotées de couleurs vives, ces créatures utilisent leur apparence pour avertir les prédateurs de leur toxicité. Par exemple, Dendrobates tinctorius, une espèce de dendrobate, fascine autant par ses couleurs que par ses usages traditionnels. En effet, les Amérindiens emploient cette espèce dans le tapirage, une technique pour modifier la couleur des plumes d’oiseaux. Ainsi, cette pratique ancestrale illustre la profonde interconnexion entre la culture humaine et son environnement naturel local.
D’autres espèces, moins connues, suscitent tout autant l’intérêt des chercheurs par leurs particularités fascinantes.
Par exemple, l’Osteocephalus taurinus se distingue par sa capacité à sécréter de la méthamphétamine.
Bien que cette substance reste encore peu étudiée, elle présente un potentiel révolutionnaire pour des applications médicales futures. En parallèle, certaines espèces d’anoures plus discrètes, comme le crapaud cornu du Brésil (Ceratophrys cornuta), intriguent par leur rareté. Surnommé « grenouille Pacman » pour sa bouche démesurément large, ce crapaud est extrêmement difficile à observer. En effet, il n’apparaît que quelques nuits par an, avec l’arrivée des premières pluies de la saison. Grâce à son camouflage parfait, il se fond dans son environnement et se révèle uniquement pendant la reproduction.


Le Saviez-Vous ?
Les grenouilles de la famille des Dendrobatidae, comme le fascinant Dendrobates tinctorius, ne synthétisent pas leurs toxines elles-mêmes. Elles les accumulent à partir des insectes qu’elles consomment, rendant ces petites créatures parmi les plus venimeuses de leur habitat. Cette stratégie alimentaire est un parfait exemple d’évolution ingénieuse dans le monde naturel.
Serpents : Des prédateurs souvent mal compris
Les serpents de Guyane souffrent malheureusement d’une mauvaise réputation, souvent injustifiée. Sur la centaine d’espèces présentes, seules douze sont venimeuses et potentiellement dangereuses pour l’homme. Parmi celles-ci, le grage fer de lance (Bothrops atrox), une vipère redoutable, s’est adaptée aux milieux anthropisés. En dépit de son danger potentiel, son importance écologique reste cruciale, notamment pour la régulation des populations de rongeurs. Le boa constrictor (Boa constrictor), appelé « sekumi tamunen » par les Amérindiens Kali’na, est l’un des plus grands serpents d’Amérique du Sud, second seulement après l’anaconda. Ce serpent est inoffensif pour l’homme, jouant un rôle vital dans l’équilibre des écosystèmes forestiers en contrôlant les populations de petits mammifères.
Les couleuvres du genre Chironius et Spilotes, surnommées « serpents chasseurs » par les Guyanais, impressionnent par leur taille et leur agilité. Ces prédateurs diurnes, comme le chasseur masqué (Chironius fuscus) et le chasseur démesuré (Chironius multiventris), traquent reptiles, petits mammifères, et oiseaux avec une précision redoutable. Ce sont des exemples parfaits d’adaptations évolutives réussies, leur permettant de prospérer dans un environnement aussi compétitif que la forêt amazonienne.


Le Saviez-Vous ?
Le venin du redoutable grage fer de lance (Bothrops atrox) est un cocktail mortel d’enzymes hémotoxiques qui décomposent les tissus et provoquent des hémorragies internes. Malgré ce danger, les habitants de la Guyane ont su tirer parti de la nature, développant des antidotes efficaces à partir de plantes locales, prouvant ainsi l’incroyable valeur des savoirs traditionnels.
Les reptiles et caïmans : Gardiens silencieux de la forêt
La Guyane abrite également une grande variété de lézards, dont le polychre marbré (Polychrus marmoratus), souvent confondu avec un caméléon en raison de sa robe multicolore. Cependant, cette confusion souligne un fait intéressant : les caméléons ne sont pas originaires du continent sud-américain. Le polychre marbré, bien que similaire dans son comportement, appartient à une famille totalement distincte, adaptée aux particularités de l’écosystème amazonien.
L’iguane vert (Iguana iguana), célèbre pour sa coloration vive à l’état juvénile, est un autre reptile emblématique. Ce reptile est prisé par les Guyanais pour la chasse, notamment en période de fêtes. Malgré son apparence robuste, l’iguane vert est une espèce vulnérable, surtout face à la destruction de son habitat naturel.
Le caïman rouge, ou caïman nain de Cuvier (Paleosuchus palpebrosus), est le plus petit des caïmans de Guyane. Bien que classé comme de « moindre préoccupation » par l’IUCN, il fait face à des menaces environnementales importantes, principalement dues à la déforestation et à la chasse. Les populations locales le considèrent comme un met de choix, particulièrement lors de repas en famille. Cependant, la consommation de cette espèce doit être régulée pour éviter une pression excessive sur les populations sauvages.
Le Saviez-Vous ?
Les caïmans nains, comme le Paleosuchus palpebrosus, possèdent une véritable armure naturelle. Sous leur peau, des plaques osseuses appelées ostéodermes leur confèrent une protection exceptionnelle, les rendant quasi invulnérables aux attaques de prédateurs et même aux morsures d’autres caïmans. Une adaptation fascinante qui témoigne de la robustesse de ces gardiens silencieux de la forêt.
Préserver un héritage naturel : Un impératif urgent
La Guyane française, avec ses 124 espèces d’amphibiens et 161 reptiles, est un joyau de biodiversité. Cependant, cette richesse est menacée par la déforestation, qui détruit chaque année des habitats critiques. Protéger ces écosystèmes, c’est préserver l’équilibre global, essentiel pour le climat et la vie sur Terre. Les communautés locales, grâce à leurs savoirs ancestraux, jouent un rôle clé dans cette conservation, tandis que la recherche continue de dévoiler des secrets prometteurs pour l’avenir. Chaque geste compte : soutenir des projets de conservation, éduquer les jeunes, ou simplement sensibiliser autour de nous. Agissons ensemble pour léguer ce trésor naturel aux générations futures.

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